Demande d’intervention militaire en Haïti : les autorités méprisent les revendications des masses populaires
Plus de 14 mois, le gouvernement de facto dirigé par Monsieur Ariel HENRY se montre indifférent face aux revendications des masses populaires haïtiennes qui cherchent à rompre avec le système politique traditionnel. Ce système ne cesse d’occasionner les violations systématiques des droits humains tant sur le plan civil et politique que sur le plan économique, social et culturel dans le pays. Aujourd’hui encore, les revendications pour la réforme de l’État, pour une justice de proximité et réparatrice, pour la décentralisation des pouvoirs politiques et la déconcentration des services sont toujours au rendez-vous.
Les mobilisations populaires de ces dernières semaines contre la cherté de la vie, l’augmentation des prix des produits pétroliers, l’appel au départ sans condition du gouvernement de facto semblent inquiéter plus d’un. La sauvegarde des intérêts de la classe dominante locale pousse le conseil des ministres du gouvernement de facto à trahir la nation en invitant des forces militaires étrangères à fouler le sol haïtien.
Le Collectif Défenseurs Plus rappelle que la maturité politique du peuple haïtien s’est toujours manifestée au cours de son histoire à travers des luttes populaires. La lutte contre l’occupation américaine de 1915, le mouvement de 1946, la lutte pour le renversement du régime dictatorial duvaliériste et la lutte contre les occupants de 2004 sont autant d’événements parmi les plus récents qui témoignent de la grandeur héroïque du peuple haïtien. Si le débarquement de 1915 n’était pas l’émanation de la volonté des autorités haïtiennes, alors les plus récents c’est-à-dire ceux de 1994 et 2004 l’ont bien été. En effet, depuis plusieurs semaines, le peuple haitien exprime son ras le bol à travers des mouvements revendicatifs face à un gouvernement dont le désarroi de ce dernier lui semble inconnu. Face à la colère de la population, le gouvernement n’a adopté que deux résolutions qui ne sont pas conformes aux normes républicaines et démocratiques. La première qui consiste à mépriser les revendications populaires comme en témoigne l’attitude du premier ministre dans ses adresses à la nation et le positionnement du ministre des affaires étrangères lors de la 77e session de l’Assemblée générale des Nations Unies. La seconde décision qui fait appel aux forces étrangères sur le sol haitien.
De plus, les séquelles des dernières missions étrangères dans le pays sont encore vivantes : près de 10 000 morts et 820 300 personnes affectées par le choléra selon un rapport de la UNICEF, de multiples cas viols et viols collectifs et des milliers d’enfants abandonnés par les soldats onusiens. Sans oublier des interventions musclées des soldats dans les différentes régions du pays contre les mobilisations populaires, comme à Lascahobas lors d’une manifestation pour l’électricité, à Verrettes pour l’éducation, respectivement en 2010 et 2011. Défenseurs Plus croit que le gouvernement doit épuiser les solutions au niveau national face à la crise. De ce fait, la solution pour évincer la crise multidimensionnelle doit être une solution haïtienne en évitant de répéter les erreurs du passé.
En conséquence, le Collectif Défenseurs Plus affirme que la venue de troupes étrangères sur le sol haitien pour souiller la mémoire de nos ancêtres n’est pas le choix de l’heure. Dans cette perspective, Défenseurs Plus, interpelle la population à maintenir les mobilisations pacifiques dans les communes du pays afin d’exiger du gouvernement le retrait de sa demande d’occupation, de garantir les droits fondamentaux de chaque citoyen et chaque citoyenne et d’œuvrer au retour à l’ordre constitutionnel. Du même coup, il invite le gouvernement à redynamiser l’institution policière pour la lutte contre l’insécurité, et un retour dans la légitimité des institutions étatiques.
Fait à Port-au-Prince, le 14 octobre 2022
Samendina Lumane JEAN
Responsable de Communication et de Plaidoyer
Tél : 509 4737 69 60