Dénonciation des violences perpétrées contre les Haïtiens et les Haïtiennes en République Dominicaine et la déportation de plus de 11 000 personnes en une semaine

Le Collectif Défenseurs Plus exprime sa profonde indignation et son inquiétude croissante face à la détérioration dramatique de la situation des ressortissants haïtiens et haïtiennes en République Dominicaine.  Cette situation se dégénère depuis l’annonce faite par le gouvernement dominicain, le 2 octobre 2024, visant à expulser massivement les immigrants haïtiens sans papiers de son territoire.  En l’espace d’une semaine, plus de 20 000 Haïtiens et Haïtiennes auraient été interpellés dans leur résidence, leur lieu du travail et dans les espaces publics. Durant la même période, les autorités dominicaines annoncent avoir expulsé près de 11 000 personnes. Ces expulsions, vers les différents points frontaliers du pays, ont été faites dans des conditions inhumaines et dégradantes.

Ces expulsions massives, qui s’apparentent à des rafles, sont menées sans discernement, frappant indistinctement hommes, femmes et enfants, et ignorant les situations humanitaires de nombre de ces personnes.  De surcroit, des cas d’assassinats ont été également répertoriés lors de la chasse aux personnes de couleurs noires en République Dominicaine, depuis le 02 octobre 2024. Les expulsions s’accompagnent de violences physiques, d’arrestations arbitraires et de traitements cruels dégradants. Ce qui constituent des violations graves des droits humains garantis par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques ratifié par l’État dominicain.

Le Collectif Défenseurs Plus dénonce fermement les violations systématiques des droits des migrants haïtiens, notamment le non-respect des droits des enfants, des personnes malades, des travailleurs migrants et des femmes enceintes.   Les témoignages reçus par le Collectif font état de détentions dans des centres surpeuplés et insalubres, de familles séparées sans respect pour les procédures légales. Des cas de violences physiques de la part des forces de sécurité et des civils dominicains inquiètent le Collectif Défenseurs Plus.  Il s’agit là des pratiques contraires aux articles 7 et 10 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui interdisent tout traitement cruel et inhumain. Ces pratiques xénophobes, racistes et discriminatoires s’assimilent au crime contre l’humanité et des pratiques génocidaires du gouvernement dominicain contre la communauté haïtienne en République Dominicaine.

Le Collectif Défenseurs Plus tient également à souligner que les expulsions massives de migrants haïtiens violent le principe de non-refoulement, inscrit dans la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés, ainsi que l’article 33 de la Charte des Nations Unies, qui empêche les États de renvoyer des individus vers des pays où leur vie ou leur liberté sont menacées.  Depuis plus de 3 ans, Haïti est plongé dans une crise sécuritaire sans précédent, marquée par une violence généralisée des groupes armés et l’effondrement des infrastructures de base. Expulser des migrants Haïtiens dans ces conditions, dans un pays en crise humanitaire, constitue une violation flagrante du droit international des droits humains.

En outre, le Collectif Défenseurs Plus souhaite également attirer l’attention de l’opinion publique sur les querelles politiques internes qui affligent Haïti, aggravant la vulnérabilité des Haïtiens et des Haïtiennes à l’étranger. Depuis plusieurs années, l’instabilité politique et les luttes de pouvoir empêchent le pays de sortir de l’impasse économique et sécuritaire dans laquelle il est plongé. Cette situation ne fait qu’exacerber la crise migratoire et forcer des milliers d’Haïtiens et d’Haïtiennes, en particulier les jeunes, à quitter leur pays à la recherche de meilleures conditions de vie. Les querelles intestines entre les élites politiques et économiques haïtiennes ne servent qu’à paralyser le pays, empêchant toute tentative sérieuse de réformes institutionnelles et de relance économique.

Le Collectif Défenseurs Plus dénonce donc non seulement les violences perpétrées à l’encontre des Haïtiens et des Haïtiennes en République Dominicaine, mais aussi l’incapacité des dirigeants haïtiens à créer les conditions nécessaires à la stabilité et au développement du pays. Il appelle les autorités haïtiennes à prendre leurs responsabilités pour mettre fin aux querelles politiques et à mettre le pays sur la voie de la paix, de la stabilité et du développement. Sans une réponse adéquate des dirigeants haïtiens, la situation des migrants ne pourrait qu’empirer, et des milliers de nos compatriotes continueront à subir des humiliations et des violences à l’étranger. L’État dominicain profite de la crise politique et humanitaire en Haïti, pour humilier la communauté haïtienne en République Dominicain alors que cette communauté joue un rôle crucial dans le développement du pays.

Fort de ces considérations sur les violences perpétrées contre la communauté haïtienne en République Dominicaine et les déportations massives des Haïtiens et Haïtiennes dans les points frontaliers, le Collectif Défenseurs Plus recommande et exige :

  1. La mise en place des structures ad oc pour accueillir dignement les Haïtiens et Haïtiennes les qui décident de retourner volontairement en Haïti ; ceux et celles qui sont expulsés par les autorités dominicaines.
  2. Le renforcement des missions diplomatiques haïtiennes en République Dominicaine afin d’assister les personnes noires (haïtiennes et personnes étrangères d’origine haïtienne) qui sont des victimes de violences et d’actes xénophobes, de traitements cruels et dégradants de la part des autorités et personnes civiles dominicaines.
  3. La réactivation de la commission mixe haïtiano-dominicaine afin d’instaurer un dialogue permanent entre les deux pays sur la gestion des crises migratoires et diplomatiques exacerbées depuis la construction du Canal de la rivière Massacre.
  4. L’arrêt immédiat des violences exercées contre la communauté haïtienne en République Dominicaine conformément aux obligations de l’Etat dominicain de protéger toute personne se trouvant sur son territoire.
  5. L’arrêt immédiat des opérations d’expulsions et de déportations des personnes noires vers Haïti. En cas de rapatriement, les opérations doivent faites en conformité avec les normes internationales en matière de droits humains.
  6. L’intervention urgente de la communauté internationale pour garantir la protection des migrants haïtiens en République Dominicaine, en appelant à la vigilance de la Commission interaméricaine des droits de l’homme et du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme sur ce dossier.
  7. La résolution de la crise politique en Haïti doit privilégier les moyens pacifiques et démocratiques, afin de créer un environnement propice à la stabilité et au retour des Haïtiens et des Haïtiennes qui ont dû fuir leur pays.

 

 

Fait à Port-au-Prince, le 11 octobre 2024

 

 

Antonal MORTIME, Av.

Co-Directeur

Tel :  +509 3715-7299

 

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