Haïti, 15 ans après le séisme de 2010 : crise persistante des droits économiques, sociaux et culturels et faiblesse des autorités étatiques
À la veille de la date marquant la commémoration de la 15e année du séisme dévastateur de janvier 2010, le Collectif Défenseurs Plus exprime sa profonde préoccupation face à la situation alarmante des droits économiques, sociaux et culturels des Haïtiennes et Haïtiens. Avec plus de 300 000 vies perdues et 1,5 million de déplacés internes à l’époque, les défis posés par la reconstruction, le droit au logement et le respect des droits fondamentaux restent criants. Le Collectif Défenseurs Plus salue la mémoire des victimes de cette catastrophe et présente ses solidarités et sympathies aux familles des victimes qui, aujourd’hui, souffrent encore de leur absence.
En violation flagrante de l’article 22 de la Constitution haïtienne, qui garantit le droit à un logement décent, plus de 1 200 000 Haïtiens et Haïtiennes vivent encore dans des conditions précaires, notamment dans des camps ou des logements informels dans la région métropolitaine de Port-au-Prince. Ces populations, souvent des déplacées internes depuis 2010, ont un accès limité à l’eau potable, à l’électricité et à des infrastructures de base. Cette situation a été exacerbée par les violences des groupes armés contrôlant quasiment plusieurs communes du pays, dont Carrefour, Cité Soleil, Croix-des-Bouquets, Ganthier, Port-au-Prince, Gressier, Petite Rivière de l’Artibonite, entre autres.
En effet, malgré les promesses de reconstruction, les actions menées par l’État haïtien et les organisations humanitaires se sont avérées largement insuffisantes. Une gouvernance faible, imbriquée par la corruption et l’absence de politiques cohérentes et durables ont aggravé la crise du logement et servent de barrières aux solutions de long terme. Les violations des droits économiques, sociaux et culturels du peuple haïtien semblent ne pas préoccuper les autorités de facto de transition.
L’État haïtien, en tant que signataire de la Convention américaine des droits de l’homme et du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC), a l’obligation de garantir un logement adéquat, conformément aux principes de dignité humaine. Les organisations humanitaires doivent également repenser leurs stratégies pour éviter des dépenses inutiles, ainsi que l’augmentation d’opérations de corruption, dans un pays appauvri et ravagé par les crises politiques et les catastrophes humanitaires.
Le Collectif Défenseurs Plus exhorte le gouvernement haïtien à reconnaître son rôle central dans la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels. Il appelle également les organisations internationales à revoir leurs approches pour éviter des solutions temporaires qui maintiennent la population haïtienne dans une dépendance chronique et dans l’extrême pauvreté et la misère.
En vue de contribuer à l’amélioration de la situation, le Collectif Défenseurs Plus formule une fois de plus, les recommandations suivantes :
- Construire des logements sociaux durables et adaptés, en priorité pour les personnes déplacées internes et les communautés les plus vulnérables.
- Créer un fonds spécial pour financer des projets de logements sociaux et reconstruire les bâtiments publics, dont le Palais national et le Palais législatif, symboles des pouvoirs d’un État républicain et démocratique.
- Appliquer des mesures anti-corruption strictes dans la gestion des fonds destinés à la reconstruction et aux logements sociaux.
- Harmoniser les politiques publiques avec les normes du Pacte international relatif aux droit économiques, sociaux et culturels (PIDESC), en garantissant l’accès aux services essentiels.
- Collaborer avec la Commission interaméricaine des droits de l’Homme et les organes de traités des Nations unies pour évaluer les progrès en matière de droits sociaux et développer les bonnes pratiques en la matière.
Fait à Port-au-Prince, le 10 janvier 2025
Emilie MARCELIN
Responsable Axe Genre
Tel : +509 49 15 7024